Mon petit dictionnaire illustré de l’Islande : Lettre P, de Patreksfjörður aux poussins


Les Islandais semblant peu friands des lieux-dits en P, on pourrait dire ici P comme piou-pious… bon OK, ce n’est pas super sympa pour les phoques, mais quand même, si vous êtes allergique aux boules de plumes en tout genre, il est encore temps de passer votre chemin ;).

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PATREKSFJÖRÐUR

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Troisième plus gros village des Vestfirðir avec ses plus de 600 habitants (après Ísafjörður et Bolungarvík), Patreksfjörður est également le nom du fjord qui l’abrite. La route 62 qui y mène offre des paysages spectaculaires, entre mer et montagnes, tantôt caressés par les rayons du soleil, tantôt nimbés de brume chatoyante…

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PHALAROPE A BEC ÉTROIT

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Le phalarope à bec étroit (Red-necked Phalarope, Phalaropus lobatus) est un petit oiseau de la famille des Scolopacidés et de l’ordre des Charadriiformes. Non seulement magnifique, il possède des caractéristiques physiques, physiologiques et comportementales singulières.

Phalarope a bec etroit, oiseaux, Islande
Phalarope à bec étroit (Red-necked Phalarope, Phalaropus lobatus), mâle adulte nuptial, Vestfirðir

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D’un point de vue physiologique tout d’abord, ces limicoles sont pourvus de petits lobes au doigt qui les aident à se propulser sur l’eau. Cette spécificité ne les empêche toutefois pas de se balader de de temps à autre sur le rivage.

Phalarope, oiseaux, Islande
Mâle de phalarope à bec étroit (Red-necked Phalarope, Phalaropus lobatus) sur les rives du lac Mývatn. Pour les yeux de lynx, noter les lobes sur les orteils 😉

D’un point de vue physique ensuite, le phalarope présente un dimorphisme sexuel inversé, les femelles étant plus grandes et colorées que les mâles. Cette spécificité s’explique par le comportement singulier des femelles qui sont parfois polyandres, c’est-à-dire qu’elles peuvent se reproduire avec plusieurs mâles au cours d’une même saison de reproduction. Cette polyandrie reste cependant séquentielle, la femelle quittant le premier mâle pour aller s’accoupler avec un autre partenaire seulement après la ponte. Le rôle des mâles et femelles est donc inversé chez cette espèce, le mâle devant ainsi assuré l’incubation des œufs et la surveillance de la progéniture. De même, ce sont les femelles qui effectuent les parades nuptiales et peuvent à l’occasion se quereller pour un mâle ou un territoire (le monde à l’envers quoi :)).

Phalarope, femelle, oiseaux, Islande
Phalarope à bec étroit (Red-necked Phalarope, Phalaropus lobatus), femelle adulte nuptial, Vestfirðir

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Une autre particularité des phalaropes concerne leur technique de pêche. Ils tournent en effet sur eux-mêmes afin de créer des micro-tourbillons qui ramèneront à la surface les petits invertébrés dont ils se nourrissent. Cette danse atypique m’avait d’ailleurs inspiré un court article il y a quelques années.

Pour de plus amples informations et illustrations sur les juvéniles, c’est également par ici.

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phalarope, oiseaux, Islande
Phalarope à bec étroit (Red-necked Phalarope, Phalaropus lobatus), femelle adulte nuptial, Vestfirðir. Noter les parties supérieures gris foncé.

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Phalarope, oiseaux, Islande
Phalarope à bec étroit (Red-necked Phalarope, Phalaropus lobatus), mâle adulte nuptial, Vestfirðir. Noter le plumage plus terne, la face, la calotte et la poitrine gris-brun terne.

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Pour conclure, à noter que si vous êtes chanceux ou doué (ou les deux comme notre ami Jérôme ;)), vous aurez peut-être la chance de croiser également un phalarope à bec large (Red phalarope, Phalaropus fulicarius). Sachez toutefois que ce cousin du phalarope à bec étroit est un des nicheurs les plus rares du pays avec quelques dizaines de couples tout au plus (contre 50 000 environ pour le cousin !)… Pour ma part, je n’ai pas encore eu l’occasion de le rencontrer là-haut mais seulement dans son pâle costume internuptial en Bretagne, voilà donc une excuse de plus pour fouler à nouveau un de ces quatre le sol islandais ;).

oiseaux, phalarope a bec large, Finistère
Phalarope a bec large (Red phalarope, Phalaropus fulicarius), adulte internuptial, Finistère (29)

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PHOQUES

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Tout comme pour les cétacés, les eaux islandaises s’avèrent propices à l’observation des phoques. On dénombre en effet pas moins de six espèces différentes sur les neuf évoluant sous les latitudes nordiques (les trois absentes sont l’éléphant de mer du Nord (Northern Elephant Seals, Mirounga angustirostris) se reproduisant le long des côtes ouest-américaines, le phoque à rubans (Ribbon seal, Histriphoca fasciata) et le phoque tacheté (Spotted seal, Phoca largha) évoluant quant à eux entre l’Alaska et la Sibérie). Parmi ces six espèces, seules deux d’entre elles se reproduisent sur l’île et sont donc nettement plus fréquentes, il s’agit du phoque gris (Grey seal, Halichoerus grypus) et du phoque commun appelé également veau marin ou encore phoque veau-marin (Harbor seal, Phoca vitulina). Les autres espèces se reproduisent plus au Nord et sont régulièrement observées en dehors des périodes de reproduction, il s’agit du phoque à capuchon (Hooded seal, Cystophora cristata), du phoque du Groenland (Harp seal, pagophilus groenlandicus), du phoque annelé ou phoque marbré (ringed seal, Pusa hispida) et du phoque barbu (Bearded seal, Erignathus barbatus). Ce dernier reste cependant rare et occasionnel.

Pour les néophytes comme moi, la différenciation des phoques n’est pas toujours aisée. A grande distance, une confusion est d’ailleurs possible entre les femelles de phoques gris et les phoques communs voire les phoques à capuchon. Tandis que le mâle de phoque gris présente un museau caractéristique, allongé et courbé vers le bas ainsi que des mensurations imposantes (jusqu’à 2,60 m de long pour près de 400 kg maximum), la femelle est quant à elle plus petite (2 m pour 250 kg max) avec un museau bien plus fin et des flancs très tachetés. Afin de la différencier de ses cousins, nous noterons en particulier la forme générale de la tête avec un museau tout de même plus long que la moyenne, des narines presque parallèles et des yeux plus près des oreilles que des narines.

A l’inverse, le phoque veau-marin est de mensurations bien plus modestes (1,2 m à 2 m pour 65 à 170 kg pour le mâle, 1,70 m pour 130 kg max pour la femelle), sans différenciations simples entre les sexes. Il existe par ailleurs une grande variation entre les pelages avec des formes sombres (à taches pâles irrégulières) et claires, ces dernières tirant parfois sur le brun-jaune ou le brun-roux.

phoque commun, animaux, Islande
Phoque commun (Harbor seal, Phoca vitulina) de forme claire, Vestfirðir. Noter les taches pâles irrégulières et les anneaux interrompus.

La tête du veau marin est nettement arrondie avec un museau comprimé et obtus. Les yeux sont équidistants des oreilles et des narines et ces dernières présentent une inclinaison caractéristique en V.

Phoque, tête, animal, Islande
Phoque veau-marin (Harbor seal, Phoca vitulina) de forme sombre, Vestfirðir. Noter le museau comprimé et l’équidistance entre les oreilles et les narines.

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Phoque veau-marin, Islande, animaux
Phoque veau-marin (Harbor seal, Phoca vitulina) curieux, Vestfirðir. Noter les narines en forme de V et les grand yeux.

Posé sur les rochers où il aime se dorer la pilule, le phoque veau-marin adopte souvent une posture caractéristique dite « en banane », avec la tête et la queue relevée. Grégaire, on peut ainsi le voir former de petites troupes sur les bancs de sable et les rochers à marée basse. Le reste du temps, il pêche poissons pélagiques et autres calmars dans les profondeurs des fjords islandais.

phoque, banane, animal, Islande
Veau marin (Harbor seal, Phoca vitulina) de forme claire au repos sur un rocher immergé, Vestfirðir. Noter la posture caractéristique en banane.

Ces dernières décennies, la population des phoques islandais a malheureusement significativement chuté au point d’inquiéter les autorités. On compterait aujourd’hui seulement moins de 4000 phoques gris contre deux fois plus dans les années 80 et probablement dans les 10000 phoques communs voire moins contre 34000 en 1980… Si cette baisse des effectifs n’est pas encore totalement comprise, on peut cependant citer différents facteurs qui y contribuent, les captures accidentelles dans les filets de pêche, la chasse illégale mais aussi la baisse des ressources alimentaires et la pression touristique sur certains spots très réputés (comme dans la péninsule de Vatnsnes par exemple). Espérons que l’Islande parviendra a enrayé cette baisse inquiétante des effectifs de ce si charmant animal…

Phoques, fjords, Ilsande, mammifères
Farniente, phoques communs (Harbor seal, Phoca vitulina), Vestfirðir.

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Phoques, eiders, animaux, Islande
Pour ceux d’entre vous qui trouvaient que ce paragraphe manquait d’oiseaux 😉 Phoques communs et eiders à duvet, Vestfirðir.

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PINGOUIN TORDA

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Appelé également petit pingouin, le pingouin torda (Razorbill, Alca torda) est un alcidé de taille moyenne, légèrement plus petit que le guillemot de Troïl (Common Murre, Uria aalge) mais nettement plus grand que le macareux moine (Atlantic Puffin, Fratercula arctica). Tout comme ces deux espèces, il colonise à la belle saison les hautes falaises islandaises pour y nicher en colonies lâches, en compagnie des macareux, mouettes tridactyles (Black-legged Kittiwake, Rissa tridactyla) et autre guillemots.

pingouin torda, oiseaux, Islande
Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

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Avec son plumage noir sur le dessus et blanc sur le dessous, il peut être confondu à grande distance avec les guillemots de Troïl et de Brünnich (Thick-billed Murre, Uria lomvia). Sa queue est cependant plus longue que celle des guillemots et recouvre entièrement ses pieds en vol.

pingouin torda, vol, Islande
Pingouin torda (Razorbill, Alca torda) en vol. A grande distance, attention à la confusion avec les guillemots de Troïl et de Brünnich. Noter la queue qui recouvre les pieds.

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De près en revanche, la confusion n’est possible avec son fort bec noir strié de blanc et comprimé latéralement. Ce dernier est bien entendu un formidable outil lui permettant d’attraper avec dextérité poissons et crustacés lors de ses vols sous-marins. Tout comme le macareux, cette forme caractéristique lui sert à stocker plusieurs poissons à la fois pour alimenter son unique rejeton de l’année.

pingouin torda, oiseaux, Islande
L’arme fatale, Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

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pingouin torda, bec, oiseaux
L’arme fatale de profil, Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

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petit pingouin, torda, rochers, Islande
L’arme fatale en plongée, Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

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pingouin torda, bec, Islande
L’arme fatale en contre-plongée, Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

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En nuptial, il possède également un long trait loral blanc caractéristique. En période internuptiale en revanche, ce trait loral disparaît normalement tandis que la strie blanche verticale sur le bec est toujours présente. Les individus de premier hiver ne possède pas de trait sur le bec et ce dernier est beaucoup plus modeste et pointu.

pingouin torda, 1er hiver, Finistère
Pingouin torda, 1er hiver (Finistère). Noter l’absence de trait blanc sur le bec et de trait loral. Le bec est également bien plus fin et pointu que chez l’adulte en période nuptiale.

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pingouin, oiseaux, Islande
Portrait, Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

Contrairement au grand pingouin malheureusement éteint depuis 1844 (merci les bipèdes un fois de plus…), le pingouin torda vole, et même plutôt bien. Son vol est vif et direct, souvent au ras de l’eau, avec des battements d’ailes très rapides. A noter que la confusion avec les adorables manchots de l’hémisphère Sud est entretenue par une spécificité de notre chère langue française (et oui, encore une :)) qui fait que nous désignons par manchots ce que les autres nations européennes appellent penguin (anglais), Pinguin (allemand), pingüino et pinguino en espagnol et italien, pinguïn (néerlandais), ou encore pinguim en portugais… Si vous voulez plus d’infos sur ces sphénisciformes, je vous conseille un petit détour chez Jérôme, il se fera un plaisir de vous les présenter ;).

pingouin torda, herbe, oiseaux, Islande
La pose verte, Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

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Oiseau monogame, le pingouin torda est également extrêmement fidèle à ses sites de reproduction. L’Islande est pour cette espèce un endroit vital, 60 à 70 % de la population nicheuse mondiale s’y reproduisant (40 % rien qu’à Látrabjarg !). Après de longs mois d’hiver éparpillés dans l’Atlantique Nord, les individus nicheurs de la sous-espèce islandica colonisent les falaises islandaises de mai à juillet (l’autre sous-espèce, Alca torda torda, plus grande, vit près des côtes nord-américaines).

petit pingouin, oiseaux, Islande
Réflexion, Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

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Sur les hautes falaises islandaises, il affectionne généralement les corniches rocheuses supérieures avec crevasses et anfractuosités, où la femelle dépose à même la roche un unique œuf de forme conique. Mâle et femelle se partageront pendant près d’un mois l’incubation, en se relayant un fois par jour seulement. Semi-nidifuge, le petit est nourri sur les falaises par les deux parents jusqu’à être emplumé, soit pendant trois semaines environ. Ce nourrissage se poursuivra trois semaines supplémentaires en mer après avoir fait le grand plongeon sous l’œil attentif du père. Il sera en mesure de se reproduire entre trois et cinq ans selon les individus et reviendra alors sur les falaises qui l’on vu éclore pour y faire naître à son tour sa descendance.

pingouin torda, rochers, oiseaux, Islande
Sa majesté Alca torda, Pingouin torda (Razorbill, Alca torda), falaises de Látrabjarg, Vestfirðir

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PLONGEON CATMARIN

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Oiseau élégant à la silhouette élancée, le plongeon catmarin (Red-throated Loon, Gavia stellata) est le plus petit des gaviidés. Nicheur en Islande, on le retrouve à la belle saison sur les petites pièces d’eau de la toundra où il élèvera ses petits.

Avec sa face gris uni, sa nuque finement striée et sa large tache rousse au cou, l’adulte nuptial ne peut être confondu. Son bec est également fin et droit, légèrement retroussé vers le haut et généralement tenu relevé ce qui lui donne un petit air hautain :).

plongeon catmarin, oiseaux, Islande
Plongeon catmarin (Red-throated Loon, Gavia stellata) adulte et ses poussins, Vestfirðir

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A grande distance et posé sur l’eau, on notera sa poitrine plate, celle des autres plongeons étant généralement bombée.

plongeon catmarin, oiseaux, Islande
Plongeon catmarin (Red-throated Loon, Gavia stellata) adulte nuptial. Noter la poitrine plate (peut être utile à grande distance pour le différencier des autres plongeons, notamment le plongeon arctique (Black-throated Loon , Gavia arctica))

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En vol, le plongeon catmarin a souvent la tête abaissée par rapport au reste du corps mais la relève régulièrement. Ses pattes, bien que fines et peu saillantes, restent généralement visibles.

plongeon catmarin, oiseaux, vol, Islande
Plongeon catmarin (Red-throated Loon, Gavia stellata) en vol. Noter les pattes fines et la tête légèrement abaissée.

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De par sa morphologie, le plongeon catmarin est un excellent pêcheur qui n’hésite pas à plonger jusqu’à 9 mètres sous la surface pour attraper ses proies (poissons, crustacés, mollusques…). De même, il est capable de décoller très rapidement et peut donc élever sa progéniture sur de toutes petites mares. Monogame, le couple passe les hivers ensemble et migre au printemps vers le site de reproduction choisi par le mâle. Le nid est un simple amoncellement de plantes aquatiques en forme de cuvette qui accueillera un à trois œufs, plus fréquemment deux.

oiseaux, Islande, plongeon catmarin
Plongeon catmarin (Red-throated Loon, Gavia stellata) en vol, avant amerrissage

Après quatre semaines d’incubation alternée (je vous rassure, la femelle bosse plus que la mâle tout de même :)), les petits tout de gris vêtus voient le jour. Bientôt, ils batifoleront sur l’eau en compagnie des parents qui les nourriront conjointement jusqu’à la fin de leur croissance.

Plongeon, poussins, oiseaux, Islande
Plongeon catmarin (Red-throated Loon, Gavia stellata) adulte et ses deux poussins, Vestfirðir.

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PLONGEON IMBRIN

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Nettement plus grand et moins élancé que le plongeon catmarin (Red-throated Loon, Gavia stellata), le plongeon imbrin (Great Northern Loon, Gavia immer) n’en est pas moins un très bel oiseau… et particulièrement en période nuptiale. Ça tombe plutôt bien, tout comme son cousin catmarin, il est également nicheur en Islande :). Certes, la population nicheuse y est limitée (300 couples environ seulement) mais il s’agit de la seule population nicheuse européenne, le reste de la population se reproduisant en Amérique du Nord (la très grande majorité en tout cas. Certains individus se reproduisent au Groenland et quelques autres irrégulièrement au Svalbard). L’Islande est donc le seul pays d’Europe où vous pourrez observer assez facilement ce bel oiseau dans sa parure de noce ;).

Plongeon imbrin, oiseaux, Islande
Plongeon imbrin (Great Northern Loon, Gavia immer) adulte nuptial, lac Mývatn

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Avec son damier blanc et noir sur le dos, sa tête et son cou noirs aux reflets verts, son collier rayé de blanc, l’adulte nuptial ne peut guère être confondu qu’avec le plongeon à bec blanc (Yellow-billed Loon, Gavia adamsii), non présent en Islande. Il s’en différencie cependant aisément avec son bec sombre et son front abrupt présentant parfois une protubérance.

plongeon imbrin, oiseaux, Colombie britannique, Canada
Plongeon imbrin (Great Northern Loon, Gavia immer) adulte nuptial, Colombie britannique

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En internuptial, le plongeon imbrin perd son beau damier blanc ainsi que son collier rayé. Ce dernier est remplacé par un demi-collier sombre au-dessus duquel une entaille blanche est visible. Le dessous de la tête devient pâle également et le dos devient uniformément sombre. Le juvénile est d’apparence très proche de l’adulte internuptial mais s’en différencie par son net motif écailleux sur le dos. Les couvertures alaires sont également dépourvues de mouchetures blanches.

plongeon imbrin, oiseaux, Finistère
Plongeon imbrin (Great Northern Loon, Gavia immer) 1er hiver, Finistère. Noter le net motif écailleux sur le dos.

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En Islande, le plongeon imbrin se reproduit sur les grands lacs de la toundra. Étant très lourd (jusqu’à 4,5 kg tout de même !), il a besoin de beaucoup plus d’espace que le plongeon catmarin pour décoller. Il se nourrit lui aussi essentiellement de poissons mais aussi de crustacés et de mollusques qu’il pêche à moins de 10 mètres de profondeur généralement. Tout comme le plongeon catmarin, il peut aussi se nourrir de plantes aquatiques.

Plongeon imbrin, oiseaux, Alberta, Canada
Plongeon imbrin (Great Northern Loon, Gavia immer) adulte nuptial, Alberta

Après un hiver passé plus au Sud à la recherche d’eaux non gelées, il revient le printemps venu sur les grands lacs pour se reproduire. Ses mœurs de reproduction et de nidification sont très proches de celles du plongeon catmarin. Les deux petits mis au monde sont souvent en compétition dès la naissance pour la nourriture et bien souvent, seul le premier né, plus grand et plus fort, survivra…

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PLUVIER DORE

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Tuu…Tuu…Tuu… Dans la vaste toundra battue par les vents islandais, les sifflements plaintifs et mélancoliques du pluvier doré (European Golden Plover, Pluvialis apricaria) trahissent sa présence avant même de l’avoir aperçu. Sympathique oiseau au manteau d’or en période nuptiale, il alerte gentiment l’intrus de passage qu’il dérange (et par la même occasion que lui niche dans les parages !). Et pour celui qui s’aventure dans la lande, nombreuses sont les occasions de se faire rappeler à l’ordre par le roi de la toundra. Ils sont en effet pas moins de 500 000 à 700 000 couples à venir se reproduire en Islande, soit près de la moitié des effectifs européens tout de même (les autres se reproduisant dans les îles britanniques, en Scandinavie ou dans le Nord-Ouest de la Russie).

Pluvier doré, oiseaux, Islande
Pluvier doré (European Golden Plover, Pluvialis apricaria) adulte nuptial, lac Mývatn

Unique pluvier présent massivement sur l’île en été, il ne peut être confondu (le pluvier bronzé (American Golden Plover, Pluvialis dominica) est très rare et occasionnel et le pluvier fauve (Pacific Golden Plover, Pluvialis fulva) n’a été observé qu’une seule fois sur l’île). En livrée nuptiale, le dos, le cou et la calotte sont tachetés d’or et de noir. Une nette bande blanche discontinue court du front au flanc. Le dessous du corps est noirâtre à noir selon les individus. Généralement, les femelles présentent moins de noir que les mâles mais les variations individuelles rendent toutefois l’identification des sexes hasardeuse pour les non avertis. A noter que les individus septentrionaux comme en Islande sont généralement plus foncés que les individus plus méridionaux (cette distinction fut d’ailleurs à l’origine de la création de deux sous-espèces mais compte tenu de la variabilité des individus, Pluvialis apricaria semble aujourd’hui considéré comme monotypique).

Pluvier doré, oiseaux, Islande
Pluvier doré (European Golden Plover, Pluvialis apricaria) adulte nuptial, lac Mývatn

Le pluvier doré est un oiseau fort apprécié des Islandais car il marque la fin du long hiver dans la pénombre et l’arrivée du printemps. Ainsi, chaque année, l’arrivée du premier d’entre eux courant mars fait les gros titres des médias… Un roi Soleil en somme ;).

Le gros de la troupe arrivant courant avril, les couples, unis pour la vie, se mettront en quête d’un territoire bien espacé des autres pluviers et propice au nourrissage des futurs rejetons (la nourriture favorite du pluvier est le ver de terre mais il se nourrit également d’insectes, de crustacés, d’herbe et de baies selon les endroits). Le mâle confectionnera seul plusieurs cuvettes rudimentaires et la femelle en choisira une qu’elle agrandira et tapissera de végétaux. Elle y déposera ensuite trois à quatre œufs qui seront incubés alternativement par les deux adultes pendant près d’un mois. Les petits, nidifuges, sont rapidement amenés sur les aires de nourrissage par les parents qui les surveilleront le temps qu’ils s’emplument et soient aptes à voler.

Pluvier doré, oiseaux, Islande
Le roi Soleil, pluvier doré (European Golden Plover, Pluvialis apricaria) adulte nuptial, lac Mývatn

Dernière anecdote sur cet oiseau que j’aime beaucoup, saviez-vous que le pluvier doré fut à son insu à l’origine du Guinness des records ? En effet, en novembre 1951, lors d’une partie de chasse dans le Sud-Est de l’Irlande, le directeur général de la brasserie éponyme, Sir Hugh Beaver manqua un pluvier doré (bien fait pour lui tiens !). Afin de justifier son loupé, il argumenta comme quoi le pluvier doré était selon lui le gibier le plus rapide d’Europe, devant le lagopède d’Écosse. Le soir venu, il chercha dans ses ouvrages la réponse sans parvenir à la trouver bien entendu. Il réalisa alors que nombre de questions de ce type devait rester chaque soir sans réponse autour des comptoirs des innombrables pubs du pays et évalua rapidement le potentiel commercial d’un ouvrage énumérant tous les records possibles et imaginables… Moins de quatre ans plus tard, le premier Guinness des records était né !

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POUSSINS

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Pour clore cette lettre P très ornitho, rien de tel que quelques boules de duvet ;). Vous aviez été nombreux à trouver les poussins d’oies à bec court sympathiques, alors je me suis dit que c’était l’occasion d’en remettre une petite louchée ici (de poussins, pas d’oies à bec court car elles ne tiennent pas dans une louche :)). Pour avoir la chance de les observer là-haut, un conseil, allez-y entre fin juin et fin juillet, vous serez alors comblé ;).

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A bientôt pour la toute petite lettre Q et merci à tous pour votre fidélité à toute épreuve ;).

29 commentaires

  1. Que vos photos sont belles, notamment les portraits des pingouin torda. Merci pour ce bain de nature.

    • Merci beaucoup Dominique, c’est très gentil à vous, l’Alca torda est un oiseau exquis, je ne pensais pas pouvoir l’approcher d’aussi près sans le gêner le moins du monde, une bien belle surprise pour de bien beaux souvenirs 😉
      Merci à vous de votre fidélité !
      Amitiés
      Sébastien

  2. Ah la surprise du matin ! Merci Seb, ça met de bonne humeur !

    Je ne sais si tu as confondu, mais je n’ai pas vu de Phalarope à bec large en Islande. C’était au Svalbard… ou alors tu parles d’un autre Jérôme ! 🙂
    Et ton Plongeon catmarin est superbe, je ne dis pas ça jaloux mais un peu envieux quand même. Je n’en ai vu qu’un et à grande distance !

    A bientôt ! 🙂

    • Salut Jérôme ou dois-je dire Jey désormais ? 🙂 Non, non, je n’ai pas confondu, je voulais simplement dire par là que tu as toujours le chic pour nous dégoter les perles rares lors de tes périples d’où ma remarque 🙂 Mais effectivement, j’aurais dû la sortir sur une espèce rare que tu avais cochée là-haut… Comme le gerfaut par exemple ? Ah ben non, c’était mon grand absent de la lettre G 😉
      Sinon merci beaucoup pour le catmarin, un superbe souvenir tu t’en doutes. J’avais repéré les deux adultes qui s’égosillaient sur le fjord et en les suivant depuis la rive, j’en ai vu un des deux filer sur une minuscule mare où l’attendaient les deux petits diables en photos. La suite s’est passée derrière quelques herbes hautes, un fantastique moment à les observer, magique…
      Bonne soirée et à très vite 😉
      Seb

      • Sur ce coup là, tu as été plus chanceux que moi ! Beaucoup plus chanceux même… enfin je l’ai vu et c’est déjà pas mal. Pour ma part il était en bord de fjord mais assez éloigné de la route et plouf, un plongeon et plus revu… 🙂

        Et pour le Gerfaut, je n’ai pas beaucoup de mérite. Ce n’est pas moi qui l’ai trouvé, j’étais juste au bon moment, au bon endroit !

      • ça compte aussi d’être au bon moment, au bon endroit, beaucoup même 🙂 Ma spécialité s’est d’arriver bien souvent après la bataille… mais pas toujours fort heureusement ! 🙂

      • Sauf que pour le coup, c’était vraiment de la chance. Je roule et je vois 3 personnes et une longue vue pointée en direction d’une falaise (c’était à Myvatn), je m’arrête et leur demande ce qu’il regarde : bah un Gerfaut pardi !

      • Effectivement 🙂 Mais tu as quand même provoqué la rencontre en t’arrêtant leur demander quand bien d’autres auraient poursuivi leur chemin sans sourciller 😉 La curiosité est peut-être un vilain défaut mais ça aide à cocher ! 🙂

  3. Très bonne idée ce film, sur la musique de Eddie Vedder que j’aime beaucoup ; on plonge de suite in to the wild.
    Magnifiques photos .
    Quel sera le voyage de l’année 2017 ?

    • Merci beaucoup, ravi que la virée sur la 62 vous ait plu 🙂 C’est un superbe endroit effectivement, comme à peu près toute l’Islande d’ailleurs ! 😉
      Je reviens tout juste de Laponie alors pour la suite je ne sais pas encore 😉
      Bonne soirée et merci encore.
      Amitiés
      Seb

  4. Bonjour Sébastien et merci pour toutes ces belles photos d’oiseaux… que je ne connais même pas pour la plupart ! Quelle patience tu as de les capturer, ça ne doit pas toujours être facile !?
    Ah et puis, ces paysages en voiture… on ne s’en lasse pas, n’est-ce-pas !
    Bonne semaine et à bientôt ! 😉

    • Salut Céline, merci beaucoup, c’est très gentil de ta part, il faut un peu de patience effectivement mais aussi beaucoup de coopération du sujet ! Et en Islande, les oiseaux sont généralement fort sympa de ce point de vue 🙂 ça aide !
      Pour les paysages en voiture, effectivement c’est le cinémascope en continu 😉
      Bonne semaine également et merci encore !
      A très bientôt 😉
      Amitiés
      Seb

  5. Wow! Tous ces beaux oiseaux. J’ai bien aimé rencontrer le pingouin torda. Son intérieure de bec jaune vif et sa rayure blanche nuptial sont magnifique. Y-a-t-il une photo où il (elle?) est couché sur son ventre en regardant vers le bas d’une falaise? Je ne savais pas qu’en français un pingouin n’était pas un « penguin ». Tes photos de plongeon catmarin (petits et grands!!!) sont magnifiques aussi. Je vois des plongeon imbrin ici en plumage non-nuptial et en plumage nuptial chez mes parents au Québec (on dit « huard » au Québec). Intéressant que la femelle phalarope à bec étroit a des couleurs plus vives que le mâle. J’ai lu que les femelles chevalier grivelé aussi sont polyandres (même système que celui que tu décris), mais elles ont le même plumage que le mâle. Je ne sais pas si d’autres « shorebirds » (limicoles?) sont aussi polyandres. Merci aussi pour les informations sur les phoques. J’aime bien le phoque banane! Et le roi soleil aussi est magnifique en regardant son territoire d’herbes courtes et de petites fleurs.

    Gros merci pour ce voyage de fauteuil. 🙂

    • Salut Myriam, merci beaucoup pour ton commentaire super sympa 🙂 Pour le torda, oui, c’est exactement ça, il ou elle regarde vers le bas de la falaise, c’était vraiment très étonnant, je me suis vraiment demandé à quoi il ou elle jouait mais je n’ai pas trouvé la réponse ! 🙂 Une très bel oiseau en tout cas et qui plus est très coopératif, un régal ! Merci pour les catmarins, encore un superbe moment que celui-là, je n’espérais pas tant, en plus dans son biotope typique, c’était extra… Pour les imbrins, ça ne m’étonne pas, ils sont assez fréquents je crois par chez toi, un des photos d’illustration a d’ailleurs été prise du côté de Jasper 🙂 Pour les limi polyandres, je crois que certains bécasseaux comme le sanderling et le variable le sont parfois aussi mais ce n’est pas systématique… Enfin, merci pour le phoque banane et le roi Soleil 😉 tout le plaisir fut pour moi 😉
      Bonne fin d’après-midi 😉
      Amitiés
      Seb

  6. Bonsoir Sébastien,
    Comme ton superbe phoque, je refais un peu surface car, depuis quelques temps, plutôt difficile de suivre notre communauté de blogueurs (certains publient à en avoir le tournis ! ;-)).
    Comme toujours… non plus encore que jamais de superbes photos et un excellent commentaire. Je mentirais en disant que j’ai été en mesure de tout lire, pour les raisons expliquées en préambule. Toutefois, je retiens un talent photographique devenu quasi professionnel : tu dois disposer d’un super zoom pour tes gros plans ?
    Merci encore, tu nous as également gâtés avec la ballade en voiture, au-dessus des nuages : l’impression d’être à la porte du paradis ! 🙂
    Cat

  7. Bien joué les phalaropes, elles ont tout compris 😉
    Des jolis clichés de pingouins, et le pluvier doré est en effet fort sympathique 🙂

      • A peine un petit mois sur deux voyages 😦 mais bien bien bien rempli ! J’espère compléter mon expérience islandaise un de ces 4, c’est un pays magique…
        Amitiés
        Seb

      • Bien rempli en effet 🙂
        Tes articles comme ceux de Jérome m’ont donné envie de faire un tour par là haut, alors que je n’étais pas plus que ça attiré par cette île à la base…
        Bonne fin de semaine 😉
        Audric

      • Avec beaucoup beaucoup de retard, merci beaucoup Audric 🙂 Ravi de lire que ça t’ait donné envie de pousser aussi loin (et aussi froid) de la Guyane 🙂 Le contraste avec elle doit d’ailleurs être complètement dingue, à l’opposé total !
        Bon week-end à toi 😉
        Amitiés
        Seb

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